L’aube transparaît à peine sur ce paysage en terrasse, et pourtant le petit groupe est déjà là. Ils sont six, vêtus de couleurs chatoyantes, les bras chargés.
Les préparatifs rituels se font : d’abord disposer tout le matériel, puis se préparer soi. Préparer les offrandes, réciter les prières et disposer fleurs, fruits et riz harmonieusement composés dans le petit autel prévu à cet effet.
A présent, ils peuvent commencer à travailler, dans la bonne humeur, comme d’habitude.
Ils pénètrent dans le champ, la boue leur arrive jusqu’aux genoux. Ils s’espacent d’environ deux mètres chacun, se mettent en ligne face à l’autel, le champ est derrière eux.
La petite machine se met en route : tous en même temps, bien synchronisés, plantent 6 multiples brins de riz. C’est que c’est toute une organisation : prendre une dizaine de brins de riz dans la main droite, les caler entre l’index et le majeur, les planter d’un mouvement rotatif du poignet à l’extrême gauche, ni trop profondément, ni pas assez, à environ un mètre de soi, sans bouger les pieds. Puis reprendre une autre dizaine de brins, les replacer entre l’index et le majeur, planter ces brins à 50 cm environ des précédents.
Et continuer sa ligne.
Chacun plante six brins : deux à gauche, deux au milieu, deux à droite. Et quand le rang de chacun est fini, un pas en arrière et le manège recommence, jusqu’à ce que l’ensemble du champ soit couvert de petits bouquets de brins.
Pendant qu’ils effectuent cette tâche qu’ils font depuis leur adolescence, ils chantent, ils blaguent, ils partagent. Cette danse des personnes est une danse de vie, ritualisée et extrêmement joyeuse.
Quand le champ est fini, ils passent au prochain, et la danse continue jusqu’au zénith, après il fait trop chaud et d’autres activités sont prévues.
Sur mon ponton, à l’abri du soleil sous l’ombrelle rouge, je les regarde, fascinée. Leur enthousiasme est communicatif et un jour, plus tard, je m’essaierai à cette pratique, je prendrai part à la danse du riz, désireuse de bien faire, appliquée, beaucoup plus lente qu’eux certes, mais tellement heureuse de participer à leur quotidien.
C’est à ce jour la plus belle expérience de partage qu’il m’ait été donnée de faire. Et depuis que j’ai appris à le danser, maladroitement, j’ai aussi appris à aimer le riz.
Et embrasser la culture de ceux qui le cultivent.
Ce texte est ma participation au 16ème jeu d’écriture du blog à mille mains, la photo est de Lizly. Il n’y aura plus d’autres jeux, je suis encore une fois limite pour les temps, mais je suis très contente d’avoir pu jouer et aller chercher l’inspiration dans les jolies photos proposées.
Bonne journée !