J’ai sorti mon cahier à couverture rouge de mon grand sac, non sans l’avoir cherché un moment. Malgré le bazar qui règne dans ma maison mobile, le cahier rouge était là, à mes côtés, fidèle au poste.
Bien plus indispensable que le téléphone portable, l’agenda ou le poudrier de sac, c’est un outil qui me suit partout et que je protège jalousement. Il est mon confident sans parole à qui je raconte mes états d’âmes, mon recueil de découvertes en tout genre, mon livre de cuisine parsemé d’anecdotes personnelles voire familiales, ma liste de choses à faire ambulante, mon aide mémoire de mots savants et règles de grammaire facétieuses, mon classeur de citations à méditer.
Quiconque en lirait quelques pages en saurait bien plus sur moi que n’importe qui. Peut être même plus que moi-même qui, de temps à autre, fais des découvertes en en parcourant quelques passages triés sur le volet, alors que je suis en quête d’une information précieusement consignée.
Cette extension de moi-même, dans laquelle je me replonge avec délice comme certains feuillettent leurs albums photo, je ne pourrais la protéger avec moult cadenas. Alors je la garde près de moi, le plus proche possible.
Car aussi insignifiants que peuvent paraître ces milliers de mots alignés et de croquis griffonnés pour un non initié, le grand cahier à couverture rouge est un réceptacle aux plus grandes richesses, au merveilleux moments, aux indescriptibles évasions que procure une existence.
Oui, je protège mon cahier dans le grand fouillis de mon sac. Oui, je le remplis d’anecdotes hétéroclites, éclectiques voire même hétérogènes.
Mais comme pour ces prédécesseurs, c’est pour mieux préserver une voie vers le cœur, la raison et l’âme, qui discourent tous ensemble dans un joyeux endroit accueillant. Pour mieux se souvenir que, en dépit des chaînes à briser, des obstacles à franchir et des barrières à faire tomber, mon modeste passage ici a un sens : celui de l’ouverture.
[Pour la consigne 63… Courage Coumarine]